Chapitre 10 Item 41 – UE 2 – Hémorragies génitales chez la femme

I.       Pour comprendre

II.    Étiologies des hémorragies génitales fonctionnelles (HGF)

III. Étiologies des hémorragies génitales hautes organiques

IV. Investigations paracliniques des pathologies de l’endomètre

V.    Investigations paracliniques des pathologies du myomètre

VI. Stratégie diagnostique devant des ménométrorragies

VII.                      Stratégie des investigations et de traitement en fonction du contexte

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Objectifs pédagogiques

*  Diagnostiquer une hémorragie génitale chez la femme.

*  Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi de la patiente.

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I Pour comprendre

Les hémorragies génitales sont des pertes de sang provenant de l’appareil génital féminin et extériorisées par l’orifice vulvaire. Elles ne sont donc pas limitées aux seules hémorragies d’origine utérine.

On distingue les différents types d’hémorragies génitales suivantes.

A Hémorragies génitales basses

Ce sont les saignements en provenance de la partie terminale de l’appareil génital. On distinguera les hémorragies vulvaires, les hémorragies vaginales et les hémorragies cervicales. Pour ces dernières, il est classique de rattacher les hémorragies de la partie visible du col aux hémorragies génitales basses et les hémorragies de l’endocol aux hémorragies génitales hautes.

B Hémorragies génitales hautes

Par définition, ce sont les saignements en provenance de la cavité utérine, extériorisés par le col. Il est habituel de classer ces saignements (d’origine utérine) en fonction de leur survenue par rapport aux règles.

C Saignements contemporains des règles

1 Règles normales

La durée des règles normales se situe entre 3 et 6 jours et l’abondance entre 50 et 80 mL (figure 10.1). Classiquement les règles sont plus abondantes les 3 premiers jours et moins abondantes ensuite. Le sang des règles normales est incoagulable.

________________________________________________________________________________Figure 10.1

Règles normales.

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La prévalence des méno-métrorragies est estimée de 11 à 13 % dans la population générale et augmente avec l’âge pour atteindre 24 % chez les 36–40 ans.

2 Saignements anormaux pendant les règles

Ménorragies

Les ménorragies sont des hémorragies génitales hautes contemporaines des règles. Par définition les ménorragies concernent les patientes en âge de procréer et non enceintes puisque réglées.

Ce sont des anomalies du cycle menstruel par augmentation de la durée ou de l’abondance des règles. Selon le type de ménorragies, on distingue :

Polyménorrhées

Ce sont des règles avec anomalies de la durée et de l’abondance (figure 10.2).

________________________________________________________________________________Figure 10.2

Polyménorrhées.

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Hyperménorrhées

Les règles sont de durée normale mais trop abondantes (> 80 mL) (figure 10.3).

________________________________________________________________________________Figure 10.3

Hyperménorrhées.

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Macroménorrhées

Les règles sont trop longues mais d’abondance normale (> 6 jours) (figure 10.4).

________________________________________________________________________________Figure 10.4

Macroménorrhées.

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Pollakiménorrhées

Les règles sont trop fréquentes, donc les cycles sont trop courts (figure 10.5).

________________________________________________________________________________Figure 10.5

Pollakiménorrhées.

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En fait, on parle le plus souvent de ménorragies pour toutes les anomalies de durée ou d’abondance des règles.

D Saignements non contemporains des règles : les métrorragies

Par opposition aux ménorragies, les métrorragies sont aussi des hémorragies génitales hautes mais survenant en dehors des règles.

1 Classification des métrorragies selon la cause

Métrorragies fonctionnelles

Elles se définissent par l’absence de substratum histopathologique utérin à l’étiologie du saignement. Elles sont dues à une altération permanente ou temporaire de l’endomètre provoquée par un déséquilibre hormonal de la balance œstro-progestative. Il peut également exister des ménorragies fonctionnelles, c’est pourquoi on utilise plus volontiers le terme d’hémorragie génitale fonctionnelle.

Métrorragies organiques

Par opposition, il existe une pathologie utérine, tubaire, voire ovarienne, à l’origine du saignement.

Dans la démarche pratique, les métrorragies fonctionnelles doivent rester un diagnostic d’élimination après avoir écarté toutes les causes de métrorragies organiques.

2 Classification des métrorragies selon le terrain sur lequel elles surviennent

Par ordre chronologique, il s’agit des métrorragies de :

         la période pubertaire : qui rassemblent les saignements vus chez l’enfant et les saignements contemporains de la puberté ;

         la grossesse : que l’on peut également subdiviser en métrorragies du premier trimestre de la grossesse et métrorragies de fin de grossesse ;

         la période d’activité génitale : qui surviennent donc avant la ménopause ;

         la période post-ménopausique : qui surviennent chez la femme ménopausée.

3 Conclusion

Cette subdivision selon le terrain de survenue des métrorragies est fondamentale dans la démarche diagnostique car nous verrons que les investigations et les causes sont particulières à chaque terrain. Nous n’envisagerons pas ici les métrorragies de la grossesse dont les causes et la prise en charge sont totalement différentes des métrorragies survenant en dehors d’un contexte de grossesse.

Cette classification théorique des saignements génitaux aide à systématiser la démarche diagnostique. Cependant en pratique, les causes des méno- et des métrorragies sont souvent intriquées chez la femme en période d’activité génitale, et le tableau clinique associe volontiers ces deux types de saignements ; on parle alors de ménométrorragies.

II Étiologies des hémorragies génitales fonctionnelles (HGF)

A En période péripubertaire

Il peut s’agir des étiologies suivantes :

         les troubles de l’hémostase :

        déficits congénitaux en facteurs de la coagulation,

        thrombopénie congénitale,

        maladies acquises de l’hémostase ;

         les hyperœstrogénies tumorales ;

         l’insuffisance lutéale liée aux anovulations.

B En période d’activité génitale

Il s’agit :

         d’HGF contemporaines de l’ovulation ;

         d’HGF prémenstruelles ;

         d’HGF iatrogènes :

        traitement œstroprogestatif : lors d’un arrêt prématuré de pilule,

        traitement progestatif : spotting,

        œstrogénothérapie mal contrebalancée par les progestatifs,

        stérilet (dispositif intra-utérin, ou DIU) libérant de la progestérone,

        traitements anticoagulants,

         d’HGF de cause générale : classiquement l’acromégalie et les pathologies thyroïdiennes.

C En période ménopausique

En l’absence de traitement hormonal de la ménopause (THM) : l’atrophie de l’endomètre peut être responsable de saignements minimes.

En présence d’un THM : tout déséquilibre de la balance œstroprogestative peut être responsable de saignements.

III Étiologies des hémorragies génitales hautes organiques

Plusieurs types de pathologies peuvent être responsables de ménométrorragies.

A Pathologies de l’endomètre

Les pathologies de l’endomètre sont :

         les pathologies endométriales qui constituent l’essentiel des étiologies des ménométrorragies ;

         les polypes endométriaux : les hémorragies sont classiquement capricieuses ;

         les hyperplasies : les saignements peuvent être abondants et de sang rouge ;

         les atrophies : les saignements sont alors plutôt noirâtres et peu abondants ;

         le cancer de l’endomètre : les métrorragies post-ménopausiques constituent le signe révélateur majeur des cancers de l’endomètre ;

         les endométrites : quelques métrorragies peuvent venir compléter le tableau qui est dominé par le syndrome infectieux et les leucorrhées.

B Pathologies du myomètre

Moins souvent en cause, les pathologies du myomètre sont volontiers associées à des pathologies de l’endomètre. Ce sont :

         les fibromes : les mécanismes par lesquels les fibromes sont responsables de ménométrorragies ne sont pas univoques :

        ils sont souvent associés à une hyperplasie de l’endomètre,

        ils induisent également des troubles locaux de la crase sanguine,

        les fibromes sous-muqueux sont la variété de fibrome principalement responsable de saignements par altération de l’endomètre ainsi que des mécanismes physiologiques des règles ;

         l’adénomyose : les hémorragies y sont capricieuses, volontiers associées à des algies pelviennes. Cette symptomatologie est volontiers rebelle aux tentatives de traitement médical ;

         les sarcomes utérins : tumeurs rares développées aux dépens de l’endomètre, du myomètre (leiomyosarcomes) ou de tous constituants de l’utérus, les sarcomes peuvent être à l’origine de saignements.

C Pathologies annexielles

Les causes annexielles sont rarement responsables de ménométrorragies. Elles comprennent :

         les salpingites aiguës : les métrorragies ne sont pas au premier plan de la symptomatologie ;

         le cancer de la trompe : tumeur très rare, volontiers révélée par des métrorragies ;

         les tumeurs de l’ovaire : elles peuvent être responsables de métrorragies par deux mécanismes :

        s’il existe une métastase endométriale de la tumeur ovarienne, ce qui est relativement fréquent dans les tumeurs évoluées,

        si la tumeur ovarienne est sécrétante : il peut alors exister une hyperplasie endométriale hormono-induite et donc des métrorragies.

IV Investigations paracliniques des pathologies de l’endomètre

A Échographie pelvienne

L’échographie est l’examen complémentaire qui doit être réalisé de première intention dans le bilan des ménométrorragies. La voie endovaginale s’avère supérieure à la voie transabdominale pour évaluer les pathologies de l’endomètre.

Plusieurs anomalies de l’endomètre peuvent être caractérisées en échographie :

         l’atrophie de l’endomètre : l’endomètre apparaît fin, hyperéchogène, il mesure moins de 5 mm d’épaisseur. En ménopause, l’atrophie endométriale est volontiers encore plus marquée ;

         l’hyperplasie de l’endomètre : épaississement diffus de l’endomètre (> 15 mm souvent), de nature hyperéchogène le plus souvent, d’aspect volontiers globuleux. Pour porter le diagnostic d’épaississement anormal de la muqueuse en échographie, il faut tenir compte du statut hormonal de la patiente ; ainsi un endomètre supérieur à 8 mm est-il suspect en ménopause et tout à fait normal chez une patiente en seconde moitié de cycle ;

         les polypes de l’endomètre : on peut parfois les observer sous la forme de lésions arrondies ou ovoïdes, hyperéchogènes, déformant peu la cavité et n’absorbant pas les ultrasons ;

         le cancer de l’endomètre : l’échographie montre en général une muqueuse utérine épaissie, > 8 mm chez une femme ménopausée. Cette muqueuse peut sembler plus hétérogène que dans l’hyperplasie simple, cependant la valeur discriminative de l’échographie entre hyperplasie et cancer reste mauvaise. Le Doppler-couleur montre une hypervascularisation de la muqueuse et éventuellement du myomètre. Au niveau de l’artère utérine, trop en amont de la tumeur, les résultats sont peu significatifs.

L’échographie, réalisée en première intention, n’est en général pas suffisante pour caractériser une anomalie de l’endomètre ; d’autres investigations paracliniques sont nécessaires.

B Hystérosalpingographie

Cet examen n’a plus d’indication dans l’exploration des ménométrorragies, sa sensibilité et sa spécificité sont en effet inférieures aux méthodes d’investigation pour la majorité des pathologies de l’endomètre. Par ailleurs, des complications rares mais graves sont possibles, notamment infectieuses.

C Hystéroscopie

Les progrès des matériels permettent de réaliser cet examen en ambulatoire grâce à des hystéroscopes souples ou rigides de très fin calibre.

La sensibilité et la spécificité de l’hystéroscopie sont supérieures à celles de l’échographie pour le diagnostic des pathologies de l’endomètre.

Elle a un intérêt supplémentaire par rapport à l’examen suivant : elle permet des biopsies dirigées ainsi que la réalisation de gestes endo-utérins à visée thérapeutique.

D Hystérosonographie

Elle consiste à injecter du liquide dans la cavité utérine et à réaliser une échographie. Le liquide permet d’ouvrir la cavité utérine et de mieux visualiser les pathologies de l’endomètre. La sensibilité et la spécificité de l’hystérosonographie sont proches de celles de l’hystéroscopie pour évaluer les pathologies de l’endomètre.

Les pathologies de l’endomètre sont évaluées au mieux en réalisant en première intention une échographie endovaginale, puis une hystéroscopie ou une hystérosonographie selon les habitudes et l’expérience de l’équipe.

V Investigations paracliniques des pathologies du myomètre

A Échographie pelvienne

Les performances de l’échographie pour évaluer le myomètre sont très variables selon la pathologie considérée.

1 Fibromes

Les recommandations du Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français (CNGOF) concernant l’échographie dans les fibromes sont les suivantes : « L’échographie est l’examen de référence. Elle doit être réalisée par voie transabdominale et transvaginale, cette dernière ayant une meilleure pertinence diagnostique. La réalisation d’une cartographie Doppler n’améliore pas la pertinence diagnostique de l’échographie. L’hystérosonographie, en cours d’évaluation, semble intéressante pour la pathologie endocavitaire associée. Il n’est pas recommandé aujourd’hui de favoriser un suivi échographique en cas de myomes asymptomatiques. »

En échographie, les fibromes apparaissent arrondis parfois, intracavitaires, absorbant les ultrasons.

2 Adénomyose

Elle est de traduction échographique inconstante :

         lésions anéchogènes de quelques millimètres de diamètre, bordées par un fin liseré hyperéchogène et situées en plein myomètre. Ces kystes sont arrondis, anéchogènes et mesurent entre 1 et 7 mm ;

         d’autres signes sont habituellement admis tels que :

        un gros utérus régulier ou globuleux et asymétrique, sans fibrome individualisable,

        une échostructure irrégulière du myomètre définie par la présence d’aires à limites imprécises, floues, d’hyper- ou d’hypoéchogénicité. Le Doppler-couleur peut aider à différencier un kyste d’une image vasculaire ou d’un myome. Les kystes endométriosiques sont avasculaires.

3 Sarcome utérin

Très difficilement différenciable d’un fibrome à l’échographie, c’est en fait souvent une mauvaise surprise lors de l’intervention ou, surtout, du résultat histologique.

B Hystérosalpingographie

Cet examen n’a plus d’indication dans l’exploration des ménométrorragies, sa sensibilité et sa spécificité étant en effet inférieures aux autres méthodes d’investigation pour la majorité des pathologies du myomètre. Par ailleurs, des complications rares mais graves sont possibles, notamment infectieuses.

C IRM

L’IRM est un excellent moyen d’évaluation des pathologies du myomètre. Sa faible disponibilité et son coût en limitent cependant encore l’utilisation dans cette indication.

1 Fibromes

Les fibromes non compliqués se traduisent par un hyposignal net en T2 et un isosignal en T1. Ainsi selon les recommandations pour la pratique clinique du CNGOF : « L’IRM dresse une cartographie précise de la taille et du nombre des fibromes. Sa place dans le bilan diagnostique reste cependant encore à évaluer. »

2 Adénomyose

L’IRM est un très bon examen d’évaluation de l’adénomyose. Classiquement, la zone de jonction est élargie en hyposignal en T2. Il est parfois possible de visualiser les kystes adénomyosiques dans le myomètre sous la forme de petites plages d’hypersignal en T2.

Les pathologies du myomètre sont évaluées au mieux en réalisant en première intention une échographie pelvienne, puis, dans des indications précises, une IRM.

VI Stratégie diagnostique devant des ménométrorragies

A Interrogatoire

Il est recommandé de réaliser un interrogatoire précis et ciblé, recherchant la notion de :

         date des dernières règles (toujours éliminer une grossesse+++) ;

         antécédents gynéco-obstétricaux : ménarches, troubles antérieurs du cycle, traitement en cours, contraception actuelle, pathologie gynécologique connue ;

         caractéristiques du saignement : circonstances d’apparition, métrorragies provoquées, relation chronologique avec les règles, abondance, durée…

         facteurs de risque d’hypothyroïdie ;

         épistaxis, gingivorragies, ecchymoses, hémorragies du post-partum ou postopératoires, antécédents familiaux d’hémorragie, devant faire évoquer un trouble de l’hémostase (maladie de Willebrand notamment) ;

         prise de contraceptif oral inappropriée (oubli) ;

         prise de traitement (anticoagulants notamment) ;

         intoxication tabagique ;

         anémie ferriprive, asthénie, pâleur, malaise, dyspnée (pour évaluer le retentissement des saignements).

Même si la définition d’hémorragie génitale correspond à un saignement supérieur à 80 mL, l’évaluation des pertes sanguines est souvent subjective.

On peut alors utiliser des pictogrammes menstruels ou « scores de saignement », tel que le score de Higham, qui permettent une évaluation objective, simple et reproductible de la quantité des pertes sanguines (figure 10.6).

________________________________________________________________________________Figure 10.6

Score de Higham modifié.

Ce score peut également être utilisé par la suite pour le suivi des patientes et l’évaluation de l’efficacité des traitements.

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Higham a proposé un score fondé sur le nombre de tampons et/ou serviettes utilisés. Chaque tampon et/ou serviette correspond à un nombre de points. À la fin des règles, on additionne le nombre de points :

         un score supérieur à 100 points correspond à des pertes sanguines supérieures à 80 mL et définit donc l’hémorragie génitale (sensibilité de ce score à 80 %) ;

         un score supérieur à 150 points augmente la sensibilité de ce score et permet de définir les patientes nécessitant une prise en charge thérapeutique.

B Examen clinique

Il est recommandé de réaliser un examen gynécologique complet avec palpation abdominale, inspection vulvo-périnéale, pose d’un speculum et toucher vaginal.

Il est également indispensable de rechercher les signes d’anémie et d’évaluer la tolérance aux saignements. (examen général avec notamment TA, pouls, recherche d’une pâleur conjonctivo-muqueuse ou cutanée, recherche de dyspnée).

En cas d’absence d’élément à l’interrogatoire, si le « score de saignement » normal et l’examen clinique sont normaux et en l’absence de signe d’anémie, il n’est pas recommandé de réaliser d’examen complémentaire à visée diagnostique.

C Examens complémentaires (figure 10.7)

En cas de ménométrorragies avérées, on réalisera :

         bilan biologique :

        βHCG +++ : afin d’éliminer une grossesse,

        numération globulaire avec formule sanguine à la recherche d’une anémie microcytaire,

        bilan d’hémostase : numération plaquettaire, TP, TCA,

        exploration spécifique en cas de maladie de Willebrand avec dosage du facteur de Willebrand (indication large de recherche de trouble de l’hémostase chez l’adolescente),

        bilan thyroïdien (TSH, T3, T4) en cas de suspicion d’hypothyroïdie,

        bilan hormonal uniquement en cas d’irrégularité menstruelle associée,

         frottis cervico-utérin pour éliminer une pathologie cervicale (selon les recommandations de la HAS) ;

         imagerie :

        en première intention : échographie pelvienne par voie sus-pubienne et endo-vaginale à la recherche d’une pathologie utérine, tubaire ou ovarienne. Le Doppler apportera des informations supplémentaires pour caractériser les anomalies endométriales et myométriales,

        en seconde intention : exploration endocavitaire par hystéroscopie ou hystérosonographie. Leurs performances semblent comparables, mais l’hystéroscopie sera préférée en cas de suspicion de cancer de l’endomètre avec biopsie dirigée,

        IRM pelvienne : non recommandée en première intention, mais indiquée en cas d’utérus polymyomateux volumineux (pour réaliser une cartographie de taille et de localisation des fibromes), de suspicion d’adénomyose et lorsque la cavité utérine est inaccessible,

        place de la biopsie d’endomètre : indiquée en cas de facteurs de risque de cancer de l’endomètre ou chez toute patiente de plus de 45 ans. Elle peut être réalisée à la pipelle de Cornier, après l’hystéroscopie diagnostique ou l’hystérosonographie. Il est également possible de réaliser une biopsie d’endomètre dirigée au cours de l’hystéroscopie diagnostique.

________________________________________________________________________________Figure 10.7

Algorithme diagnostique pour la prise en charge des ménométrorragies.

(D’après Huchon C, La Revue du Praticien 2009, avec la permission de l’auteur.)

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VII Stratégie des investigations et de traitement en fonction du contexte

A Dans l’enfance

Le plus souvent, les saignements sont en rapport avec une vulvovaginite à corps étrangers (intérêt de la vaginoscopie) ou iatrogène (prise de contraceptifs oraux de la mère). Les anomalies endocriniennes sont exceptionnelles et s’accompagnent dans ce cas d’anomalies des caractères sexuels secondaires et de signes d’hyperandrogénie.

B En période péripubertaire

Après avoir éliminé une grossesse, les deux principales causes sont une pathologie fonctionnelle et un trouble de la coagulation (maladie de Willebrand, thrombopénie, thrombopathie …), rarement une pathologie tumorale endocrinienne (cf. chapitre « Puberté »).

En premier lieu, il faudra identifier et traiter les coagulopathies.

Le traitement est essentiellement symptomatique, avec pendant les règles :

         antifibrinolytiques : acide tranexamique (Exacyl® ou Spotof®) 2 à 4 g/j en début de cycle, pendant 5 jours ;

         ± AINS : acide méfénamique (Ponstyl® 2 gélules à 250 mg 1–3/j), ibuprofène (Brufen® 2 gélules à 400 mg 1–2/j), ou naproxène (Naprosyne® 2 gélules à 500 mg 2–4/j).

Le traitement étiologique consiste à rétablir un équilibre œstroprogestatif en cas d’hémorragie fonctionnelle par la prescription d’un progestatif lutéomimétique type prégnane (Colprone® ou Lutéran®), ou progestérone 10 j/mois en deuxième partie de cycle, voire d’un progestatif plus atrophiant (norprégnane Surgestone® ou Lutényl®) 20 j/mois en cas d’hémorragie sévère. Le traitement sera poursuivi pendant au moins trois cycles.

Un contraceptif oral minidosé peut être une alternative thérapeutique.

En cas de maladie de Willebrand, la desmopressine peut être utilisée en cas d’urgence.

C En période d’activité génitale

En premier lieu, il faut toujours éliminer une grossesse éventuelle chez une patiente en période d’activité génitale (étiologies et traitements des métrorragies spécifiques de la grossesse).

Il convient de distinguer les traitements en fonction du désir de grossesse éventuel.

1 En cas de désir de grossesse

Prise en charge des ménométrorragies idiopathiques

On proposera un traitement médical en première intention.

Du plus efficace au moins efficace :

         DIU au lévonorgestrel (Miréna®) ;

         acide tranexamique (Exacyl® ou Spotof®) : antifibrinolytiques ;

         contraceptifs oraux œstroprogestatifs ou progestatifs 21 j/mois ;

         AINS.

En cas de désir de grossesse immédiat ou de contre-indication aux traitements hormonaux, il est recommandé d’utiliser l’acide tranexamique.

Ne pas oublier d’y associer un traitement martial en cas d’anémie ferriprive.

En cas de désir de grossesse, les possibilités thérapeutiques chirurgicales sont limitées. Seul le curetage peut être proposé, mais son efficacité est aléatoire et temporaire.

Prise en charge des ménométrorragies organiques : traitement étiologique

La prise en charge dépend de la pathologie responsable des ménométrorragies :

         hyperplasie atypique de l’endomètre : curetage biopsique + traitement médical pour 6 mois (progestatifs per os ou analogues de la GnRH) avec contrôle histologique au bout de 6 mois ;

         polypes endométriaux : résection hystéroscopique ;

         myomes : traitement médical et discuter une myomectomie ;

         adénomyose : analogues de la GnRH + add back thérapie (adjonction d’œstrogènes à faible dose pour traiter les effets secondaires liés à la ménopause induite par le traitement).

2 En l’absence de désir de grossesse

Prise en charge des ménométrorragies idiopathiques

Chez une patiente présentant des ménométrorragies idiopathiques, il existe plusieurs possibilités thérapeutiques :

         traitement médical per os : acide tranexamique ± AINS ;

         progestatifs per os ;

         DIU au lévonorgestrel (Miréna®) ;

         traitement chirurgical conservateur (en cas d’échec des traitements précédents) : technique de destruction de l’endomètre de 2e génération (ballonets thermiques, micro-ondes, radiofréquence) ou de 1re génération (endométrectomie, roller ball). Hystérectomie (voie vaginale, cœlioscopique ou par laparotomie) en cas d’échec des traitements précédents.

Prise en charge des ménométrorragies organiques

La prise en charge dépend de la pathologie causale des ménométrorragies :

         hyperplasie atypique de l’endomètre : traitement chirurgical radical par hystérectomie du fait du risque d’évolution vers le cancer de l’endomètre ;

         polypes : résection du polype par endoscopie ± endométrectomie ou pose de DIU au lévonorgestrel (quand la femme n’est pas ménopausée) ;

         myomes :

        traitement médical pour réduire les saignements, corriger l’anémie et préparer une éventuelle intervention chirurgicale,

        embolisation artérielle (en alternative à la chirurgie),

        traitement chirurgical : hystérectomie ou myomectomie si refus,

         adénomyose :

        en 1re intention : analogues de la GnRH ou DIU au lévonorgestrel ou endométrectomie ou destruction de l’endomètre,

        hystérectomie en cas d’échec ou de refus.

D En période ménopausique

Il faut éliminer une pathologie organique, et en premier lieu le cancer de l’endomètre, bien que la principale cause soit fonctionnelle, notamment sous THM (figure 10.8).

________________________________________________________________________________Figure 10.8

Stratégie des investigations devant des ménométrorragies : patiente ménopausée.

CB : curetage biopsique ; HSC : hystéroscopie.

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Dans ce cas, la première étape est l’arrêt du THM. Il faut ensuite réévaluer la symptomatologie avant de mettre en œuvre des explorations complémentaires puis d’adapter ou de modifier le nouveau THM.

En cas de diagnostic d’atrophie endométriale à l’échographie, il est recommandé de réaliser un prélèvement de principe (pipelle, curetage biopsique) afin de vérifier l’absence d’anomalie associée, non dépistée par l’imagerie (en effet l’association atrophie – cancer de l’endomètre n’est pas exceptionnelle).

Il est indispensable de réaliser des explorations plus poussées (telle qu’une hystéroscopie diagnostique) en cas de terrain d’hyperoestrogénie, d’échographie douteuse ou peu contributive ou de prélèvement anormal ou abondant sur l’étude histologique.

Pour certaines équipes disposant facilement de l’hystéroscopie diagnostique ou de l’hystérosonographie, ces examens seront systématiquement réalisés après l’échographie.

E Cas particulier : patiente sous anticoagulant

Il est recommandé de réaliser un INR en urgence à la recherche d’un surdosage en anticoagulant.

En cas de surdosage, les mesures de correction de l’INR seront mises en œuvre (vitamine K…)

Dans tous les cas, il faudra rechercher une pathologie gynécologique sous-jacente responsable des ménométrorragies.

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Points clés

         L’hémorragie génitale est un motif fréquent de consultation.

         Les deux principales étiologies chez les femmes jeunes sont les dysfonctionnements hormonaux et la grossesse.

         Il convient en premier lieu d’éliminer une grossesse chez la patiente en âge de procréer.

         L’examen complémentaire essentiel est l’échographie pelvienne.

         Elle est réalisée par voie abdominale et surtout par voie vaginale.

         L’IRM est particulièrement indiquée en cas de suspicion d’adénomyose.

         Le traitement dépend de l’étiologie.

         Chez l’enfant, il faudra rechercher un traumatisme.

         En période prépubertaire, le traitement repose sur l’administration per os de progestatifs en continu le plus souvent.

         Au cours de la vie génitale, les trois moyens à notre disposition sont : les traitements médicaux, la destruction de l’endomètre et les techniques chirurgicales.

         En période post-ménopausique, il faudra éliminer un cancer de l’endomètre.

         En post-ménopause, si un THM est utilisé, il sera souhaitable de l’interrompre dans un premier temps puis de le réajuster ; sinon l’objectif sera d’éliminer un cancer de l’endomètre.

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